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Réécrire mon histoire !

Je m’appelle Béatrice Merkel, je vis en France dans un petit appartement avec Samy, mon bouvier bernois de couleur noir et feu. J’ai quarante-cinq ans et j’ai retrouvé mes parents biologiques.

Voici mon histoire !

Je suis née le 12 avril 1963 à Berlin. Pendant quinze ans, les quinze premières années de ma vie, j’ai vécu avec des personnes qui n’étaient pas mes vrais parents, ils m’ont adoptée le jour qui suivait ma naissance. Le jour de mes seize ans, j’apprends sans le vouloir la vérité. Mes parents discutaient sur la façon dont ils allaient m’annoncer la nouvelle, mon père ne voulait rien me dire et ma mère voulait me le dire sans plus attendre. Finalement mon père a eu le dernier mot : ils ne m’ont rien dit.

Je décide alors de rechercher des informations sur mes parents biologiques. Ma mère s’appelle Marie Martin et habite en France, quant à mon père, son nom n’apparaît sur aucun papier, il est noté aussi que ma mère n’avait que seize ans quand elle a découvert qu’elle était enceinte et que mon père l'a laissée tomber dès qu’il l’a su. Sans en parler autour de moi, je continue ma vie tranquillement en sachant pertinemment qu’un jour j’irais en France, retrouver mes racines.

A vingt ans, je décide de m’installer dans le 13e arrondissement de Paris, vers la place d’Italie. Les cinq premières années, j’essaie de me familiariser avec ce nouveau pays que je ne connais pas, sa langue et tous ses habitants. Après avoir appris à parler couramment le français, je trouve du travail dans une banque où je suis conseillère clientèle.

Tous les week-ends, à l’aide de Corinne, une femme qui s’occupe des personnes à la recherche de leur passé, j’essaie de retrouver mes parents et surtout ma mère. Pour le moment, Corinne et moi n’avons rien trouvé à part que mon père est d’origine franco-allemande et qu’il s’appelle Franz David. Corinne m’a dit qu’elle organiserait les rencontres et m’épaulerait en cas de malaise. De jours en jours, j’apprends de nouvelles choses, ma mère habite toujours à Paris dans le 15e arrondissement, elle est mariée et a trois enfants : deux filles et un garçon.



Vendredi 23 mai 1988, dix heures, dans le bureau de Corinne

Ce matin, Corinne m’a appelée pour me demander de venir à son bureau le plus vite possible. Je n’ai pas eu le temps de répondre qu’elle avait déjà raccroché. Maintenant je l’attends car elle est en réunion. Je ne sais pas ce qu’elle a à me dire mais cela avait l’air très important. J’espère que c’est à propos de ma mère, je suis très impatiente de la rencontrer maintenant que je sais comment elle s’appelle et où elle habite.



Vendredi vers midi, sur la terrasse d’un café parisien

C’est bon, je sais enfin de quoi Corinne voulait me parler. Elle a pris contact avec Marie, ma mère biologique. Elle ne veut pas encore me rencontrer. Corinne m’a dit qu’elle avait peur que je lui en veuille de m’avoir abandonnée à la naissance. Ce qu’elle ne sait pas c’est que j’ai tout quitté pour la rencontrer et que je ne lui en veux pas du tout, après tout, elle était trop jeune pour me garder et cela je le comprends tout à fait. Ce n’est pas grave, j’attendrai qu’elle soit prête, si cela m’était arrivé je pense que j’aurais eu la même réaction.

« Mmmm... délicieux ce cocktail orange, pamplemousse, fraise. Je pense que je reviendrai. »

Tiens, voilà Corinne, elle a l’air vraiment heureuse, j’espère que c’est une bonne nouvelle.




Vendredi vers dix-neuf heures, devant la télé

Corinne avait bel et bien une très bonne nouvelle. Elle a retrouvé Franz, mon père. En venant en France, je ne pensais vraiment pas retrouver mon père. La conversation s’est déroulée de cette manière :

- « Salut, comment vas-tu depuis tout à l’heure ? m’a dit Corinne.

- Très bien, depuis que tu m’as annoncé la bonne nouvelle !

- J’espère que tu es bien assise car j’ai encore une bonne nouvelle.

- Ah oui ! quoi ?

- Après que tu sois partie, j’ai fait quelques recherches en pensant trouver des choses sur Marie, je suis tombée sur des infos sur Franz.

- C’est vrai, je croyais qu’il habitait encore en Allemagne et qu’il avait refait sa vie.

- J’ai agrandi mes recherches et j’ai réussi à trouver un numéro que j’ai tout de suite appelé sans plus attendre.

- Oh, tu as bien fait ! »

Je n’en croyais pas mes oreilles, en quelque mois, j’avais retrouvé mon père et ma mère.




Lundi 26 mai, quatorze heures sous la tour Eiffel

Je suis sous la tour Eiffel, Franz a bien voulu me rencontrer dès aujourd’hui.

Il m’a donné rendez vous à quinze heures, mais je suis venue plus tôt pour discuter avec Corinne qui me donne beaucoup de conseils pour ne pas paniquer.

Conseils :

- Ne pas paniquer ; après tout c’est ton père.

- Ne pas te précipiter.

- …

Vite, le voilà, que dois-je faire ?





Lundi, vingt-trois heures dans ma chambre

J’ai passé le meilleur après-midi de ma vie. Quand il est arrivé, il m’a direct sauté dans les bras. J’ai été surprise que dès la première rencontre, on soit si proches. Je trouve que je lui ressemble un peu. On a le même nez, la même bouche et les mêmes yeux couleur bleu azur.

On a passé l’après-midi à marcher le long de la Seine et à discuter. Il n’a fait que de s’excuser de m’avoir abandonnée sans raison, qu’il n’aurait pas dû et si c’était à refaire, il ne laisserait pas passer cette magnifique chance d’avoir un enfant. Ses parents, mes grands-parents, ne voulaient pas qu’il continue la relation avec ma mère et quand ils ont su qu’elle était enceinte, ils ont déménagé direction l’Allemagne.

Aujourd’hui, mon père a quarante-trois ans, il n’a juste que dix-huit ans de plus que moi. Ma mère n’en a que quarante-et-un. J’espère qu’un jour elle voudra me rencontrer et pourquoi pas, me reconnaître en tant que mère biologique et annuler l’adoption avec mes autres parents avec qui je n’ai plus aucun contact. Bien, après cet après-midi de folie, je suis énormément fatiguée, je vais donc aller me coucher pour me réveiller très tôt pour aller voir Corinne et tout lui raconter.





Mercredi 2 juillet, dans un resto branché dans le 1er arrondissement

Après un mois, ma mère, m’a téléphoné à la banque, mon responsable n’était pas très content. Avant d’être embauchée, il m’avait demandé si j’avais de la famille qui pouvait être susceptible d’appeler sur le poste central. Bien sûr, en arrivant je ne connaissais personne donc je lui avais répondu que personne n’appellerait.

« Oui, bonjour !

- Euh bonjour, Béatrice Merkel ?

- Oui, c’est moi-même.

- Bon, j’me lance...

- Allo ?!
- Je m’appelle Marie Martin, je suis ta mère biologique.

- Ah ! Bonjour, comment allez-vous ? vous préféreriez que l’on se tutoie ou que l’on se vouvoie ?

- Si cela ne te dérange pas, je préfèrerais que l’on se tutoie.

- Très bien comme vous... tu veux. »

Maintenant, je l’attends dans un restaurant branché du 1er arrondissement de la capitale, elle ne devrait pas tarder. Je stresse, j’espère que je vais être à la hauteur de ses espérances, je ne sais pas à quoi elle ressemble, je n’ai aucune photographie, même mon père n’en avait pas. Tiens, je crois que c’est elle, il y a une personne qui scrute du regard le restaurant. Elle vient vers moi, que dois-je faire ? Comment va-t-elle réagir en me voyant ?





Mercredi, plus tard dans la soirée

Le repas s’est très bien passé, elle a eu la même réaction que mon père en me voyant : elle m’a souri et m’a embrassée en me disant que j’étais une très jolie femme. On s’est assises à une table et on a beaucoup discuté. Nous étions tellement heureuses que nous nous sommes mises à pleurer de joie, nous avons tellement de points communs. On a passé la journée à discuter, à nous poser des questions sur nos vies respectives. Je sais maintenant comment s’appellent mes demi-sœurs et frère et mon beau-père qu’il me tarde de rencontrer.







Vingt ans plus tard

Aujourd’hui, nous sommes le 3 février 2008, je vis toujours dans le même appartement dans le 13e arrondissement de Paris, vers la place d’Italie, avec mon chien Sammy qui ne me quitte plus. Je travaille toujours dans la même banque mais je ne suis plus conseillère clientèle, mon patron qui devait partir en retraite, m’a laissé son poste de directeur d’agence. Ce métier me convient très bien, j’aime avoir beaucoup de responsabilités.

Tous les dimanches, je passe chez ma mère, pour voir ma nouvelle famille, avec qui je passe de bons moments. Mon père, lui, est reparti en Allemagne, retrouver sa famille, il m’a dit que si je n’avais pas été là, il n’aurait jamais été capable de retrouver ses parents.

Le jour de mes trente-cinq ans, mes parents adoptifs m’ont téléphoné, ils étaient heureux pour moi. Ils se sont beaucoup excusés, j’ai bien sûr accepté leurs excuses et j’ai gardé contact avec eux. Quand je décide d’aller rendre visite à mon père et à mes grands parents paternels, je passe leur dire bonjour, mais bien sûr ce n’est plus comme quand j’avais six ou sept ans.

Quant à Corinne, fidèle à elle-même, elle continue de rendre heureuses les personnes comme moi. Elle a réussi à me rendre la vie dont je rêvais.
AM
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